La vie des gens du voyage

ATD Quart Monde Int
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3 min readMar 6, 2018

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Quand on n’a pas d’adresse, par manque de logement ou parce qu’on vit dans des sous-locations ou sur des terrains non reconnus, il est très difficile d’accéder à ses droits. Et quand en plus on fait partie de la communauté des gens du voyage, les difficultés s’accumulent. Jean-Claude D raconte comment il doit se battre, avec d’autres, pour faire valoir ses droits.

Par Jean-Claude D (France)

Nous sommes 8 familles à vivre dans des caravanes. On a un groupe électrogène pour avoir l’électricité, la lumière, la télévision. Il n’y a pas de raccordement électrique. Et si la nuit on a besoin, on allume une bougie. On n’a pas l’eau, donc on va chercher l’eau à une borne-incendie avec un camion-citerne, à 5 kilomètres. La mairie nous amenait de l’eau avant mais
elle ne vient plus. Avant, j’avais une poste restante, je devais payer 50 centimes par lettre pour récupérer mon courrier. De 2004 à 2009, j’ai fait une domiciliation au Centre communal d’action sociale (CCAS) de la ville que je devais renouveler tous les ans. En 2009, le maire a refusé le renouvellement. Ils m’ont renvoyé à la mairie voisine, j’ai fait deux lettres mais le maire a refusé aussi. C’était compliqué. Je me suis dit :Je n’ai plus d’adresse, comment je vais faire ! ”. Pendant un temps, une personne a accepté que je reçoive le courrier chez elle. Avec ATD Quart Monde, et avec une juriste,

on a écrit au préfet qui a refusé aussi. Donc on a écrit au défenseur des droits qui a écrit au préfet.

J’ai attendu la réponse, j’ai attendu. Pas de réponse ! On est allé à la mairie mais ils ont dit ne rien avoir reçu. J’ai montré la lettre du défenseur. Et là, ils se sont rappelés qu’ils avaient un accord de domiciliation pour moi qui attendait la signature du Maire. Quinze jours après, la mairie a dit que c’était bon. Mais j’ai dû faire un combat.

Sans adresse, je n’aurais pas pu me faire opérer. Je suis allé à l’hôpital voir le médecin mais à l’accueil, ils ne voulaient pas en me disant : “ Vous n’avez pas d’adresse ! ”. Ils m’ont envoyé chez l’assistante sociale qui m’a dit que j’étais
en règle, j’avais ma carte d’identité, ma carte vitale, donc que je pouvais y aller. Je n’ai pas baissé les bras, je ne suis pas parti, j’ai persévéré. J’ai eu mon rendez-vous, j’ai gagné le combat.

Mon troisième combat, c’est pour un logement. Je voudrais un logement, pour avoir l’eau, l’électricité, des toilettes. J’en ai fait la demande à la mairie avec ma mère et ma sœur en 2004. Tous les ans, il fallait renouveler. En 2009, on a changé de terrain et je recevais mon courrier chez ma tante. J’ai reçu une offre de logement mais j’ai eu le courrier trop tard et je n’ai pas eu le logement. En 2015, j’ai arrêté, je n’avais plus le courage. Plus tard, je faisais partie d’un groupe ATD Quart monde qui encourageait les gens à faire leur demande de logement. Patricia (militante Quart Monde) m’a demandé pourquoi je ne renouvelais pas moi-même ma demande. Elle m’a beaucoup entrainé. J’avais gagné le combat du courrier puis celui pour me faire opérer alors j’ai renouvelé ma demande avec patience chaque année. Ma caravane était morte, elle prenait l’eau. J’avais fait un peu d’économie et j’en ai trouvé une qui me plaisait sur Internet. J’hésitais encore quand j’ai reçu une offre de logement. A la visite de l’appartement, il y avait une autre personne avant moi. Huit jours après, on me téléphone : “ La personne n’a pas répondu, l’appartement est pour vous ! ” Je n’y croyais pas, je me rappelle avec Corina, je lui avais dit :

Je veux un appartement pour inviter les gens chez moi ”. Lorsque le gardien m’a donné les clés, j’ai dit : “ J’ai gagné le troisième combat ”. Il faut dire aux gens : “ C’est important de ne pas baisser les bras ”.

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