L’entrepreneuriat social : un moyen de sortir de la pauvreté ?

ATD Quart Monde Int
1001 Histoires
Published in
4 min readAug 23, 2017

--

L’engagement de Claudia, avec son organisation à but non lucratif au Texas, pour aider les familles en situation de pauvreté à réaliser leurs rêves.

Photo Cultureveille

Par Marcia C. Kresge (États-Unis)

L ’entrepreneuriat social serait-il un moyen de sortir de la pauvreté ? Pour répondre à cette question, nous sommes allés à la rencontre de Claudia. Il y a cinq ans, celle-ci a fondé une organisation à but non lucratif qui aide les familles en situation de pauvreté à réaliser leurs rêves.

Claudia a grandi à Brownsville, au Texas. Elle s’est mariée jeune et a perdu son mari lors d’une fusillade de quartier, se retrouvant à élever trois enfants seule. Malgré son deuil, son talent pour créer du lien social et sa ténacité l’ont poussée à devenir coordinatrice des parents [1] dans une école publique locale.
Elle a écrit et produit des pièces de théâtre auxquelles ont participé des familles de l’école et des membres de l’église qu’elle fréquente. Les thèmes du harcèlement et de la poursuite de ses rêves sont récurrents dans ses œuvres. Après avoir organisé de nombreuses activités et réunions pour que les parents s’impliquent davantage dans le travail scolaire de leurs enfants, Claudia a décidé de voler de ses propres ailes. Afin que les parents aient toujours un rôle à jouer, elle leur a demandé de s’acquitter de frais d’adhésion mensuels peu onéreux. Des bourses scolaires généreuses ont été accordées aux familles dans l’incapacité de payer.

En tant que coordinatrice des parents, Claudia a noté que les collégiennes qui étaient le plus en retard dans leur travail scolaire affichaient un comportement désagréable et séchaient les cours. Sa première action a été de les impliquer dans une équipe de danse et de les faire participer à des répétitions hebdomadaires.

Elle s’est aussi entretenue individuellement avec chaque jeune fille pour comprendre ce qui, chez elles ou dans leur voisinage, expliquait leur désintérêt scolaire. Divorce, harcèlement de la part d’autres élèves, pauvreté, parents trop occupés pour vérifier le travail scolaire de leurs filles : telles sont les causes qui sont ressorties de ces discussions.

Claudia a voulu apporter son aide aux collégiennes et à leurs familles. Elle a donc mis en place plusieurs initiatives dans l’espoir de briser le cercle de la pauvreté : des cours de danse, des réunions pour réfléchir sur l’éducation, l’art de communiquer avec des professionnels, l’organisation de sorties scolaires ou encore des activités d’intérêt collectif.
En dehors des frais d’adhésion minimaux payés par les parents pour rémunérer le professeur de danse, les formations et les cours d’accompagnement et de soutien sont gratuits.

Claudia et son organisation à but non lucratif ont pour vision de créer “ une harmonie à trois voix ” entre l’école, la maison et la communauté.

Alors que son projet grandissait, Claudia est venue frapper à la porte de la maison de quartier dans laquelle je travaillais. Elle cherchait un lieu d’entraînement et d’aide aux devoirs pour les collégiens et lycéens qu’elle aidait.

Nous avons longuement hésité à lui faire payer le loyer, car elle proposait des activités qui ne faisaient pas partie de notre programme. Elle venait tout juste de débuter et espérait trouver un autre lieu de travail que son domicile, le groupe de danse qu’elle avait monté étant trop grand pour son salon. Mais la maison de quartier était dans une situation plutôt précaire, et il a finalement été décidé de lui faire payer une petite somme pour l’utilisation des locaux.

Nous avons aussi diminué de moitié le prix des frais concernant ses activités artistiques et ses programmes de soutien. Les cours organisés par Claudia pour les enfants étaient riches et variés : les filles servaient un festin pour la
fête des mères ; les garçons et adolescents étudiaient ensemble ; les filles faisaient des représentations dans la communauté lors des fêtes de quartiers et des festivals en plein air. En partageant les locaux et en devenant partenaires, Claudia et la maison de quartier ont mis en place une véritable relation gagnant-gagnant.

Finalement, la maison de quartier a fermé ses portes quand les propriétaires ont décidé de vendre les murs à des promoteurs immobiliers. Mais Claudia ne s’est pas arrêtée là et, en partenariat avec la Police Athletic League [2] , son organisation a pu trouver des locaux gratuits. L’aventure n’a pas été toujours facile et suscite souvent des doutes chez Claudia elle-même. Il est compliqué pour elle de ne toucher aucun salaire tout en s’acharnant à ce que les collégiens et lycéens continuent de s’entraîner et d’étudier. Toutefois, elle arrive à garder espoir grâce à son implication auprès des familles et étudiants avec qui elle a commencé à travailler, et qui sont désormais à l’université, en train d’exercer le job de leurs rêves ou même d’accompagner de nouvelles personnes.

Claudia a pris le risque de fonder une organisation à but non lucratif pour aider sa communauté. Elle a cru en son rêve d’avoir un jour des locaux pour ses projets de soutien, de danse et de préparation à l’université.

Grâce à ses initiatives, elle a permis à des enfants qui faisaient face à de nombreuses épreuves de devenir des adultes qui aident aujourd’hui les autres à surmonter leurs propres difficultés.

Alors, est-ce que l’entrepreneuriat social est le moyen de sortir de la pauvreté ?

L’histoire de Claudia montre que la route qui mène à la réalisation de ses rêves est pleine de défis, mais le souci des autres et son implication auprès des familles lui ont permis de garder le cap et de surmonter les difficultés rencontrées.
Pour connaître davantage Claudia, rendez-vous sur son site : Project Mentor Development Council Inc.

[1] Coordinateur des parents : Employé d’une école chargé de soutenir les activités de l’école et d’encourager l’implication des parents.

[2] Police Athletic League : Organisation mise en place dans de nombreux services de police américains, dans laquelle des policiers aident des jeunes dans des activités scolaires et extrascolaires.

--

--

ATD Quart Monde international, présent dans plus de 30 pays. #StopPauvreté, droits de l'homme, #ODD. Suivez l'action France sur @ATDQM