« si tu veux bien, je te donne ma place »

Une attention et l’occasion d’un vrai soutien pour trouver un travail ont permis un beau chemin vers la dignité et l’amitié.

Par Félicité Kaboré (Burkina Faso)

Je suis maman de plusieurs enfants et j’habite dans un gros village du Burkina Faso au centre de plusieurs villages de brousse. Ici on appelle « concessions » les lieux de vie et d’habitation. Les gens sont presque tous agriculteurs. Pendant la saison des cultures qu’on appelle l’hivernage il y a beaucoup de travail dans les champs. Tout le reste de l’année c’est la sècheresse, c’est donc très important de faire une bonne récolte. Avoir des greniers à mil bien rempli permet d’avoir à manger jusqu’à la saison des pluies de l’année suivante. La « soudure » est parfois difficile. Dans notre culture quand une femme se marie elle quitte la famille de ses parents et va habiter dans la famille de son mari.

A proximité de notre petite ville une femme s’est retrouvée seule pour assumer la charge de ses 5 enfants. Je connaissais la situation de cette femme et un jour je suis allée la voir pour lui demander si je pouvais l’aider à s’en sortir. Elle avait l’habitude d’aller chercher le secours dans sa propre famille et elle partait pour trouver de quoi nourrir ses enfants. Quand je suis allée la voir, je lui ai dit que je n’avais rien, seulement un peu de mil, et que je pouvais lui donner ce peu de mil pour la sauver un instant.
Quelques temps après, il y a eu une occasion de trouver une solution pour plus longtemps. En effet la mairie cherchait à employer des personnes pour nettoyer les rues. Nous sommes parties toutes les deux pour participer au tirage au sort qui permettrait, ou non, d’être embauché pour ce travail, j’ai tiré un ‘ oui ’ mais la dame a tiré un ‘ non ’. Moi j’ai déjà un travail, alors je lui ai dit « si tu veux bien je te donne ma place pour que tu puisses faire le balayage à la mairie ». Je l’ai fait de façon discrète pour que ce ne soit pas dévoilé à sa
famille. La dame a accepté l’offre, elle est partie pour le travail et elle a gagné un peu. Avec cet argent elle a payé un vélo. Avec ce vélo, elle est partie en brousse pour aller couper le bois. Elle est partie vendre le bois et avec cet argent, elle a pu acheter 10 tôles et des briques et elle a pu construire une maisonnette. Avant sa maison était une case en paille, l’eau rentrait dedans. Avec sa nouvelle maisonnette, pendant la saison des pluies, elle et ses enfants étaient à l’abri.

Comme son travail consistait à vendre du bois, un jour, elle est venue m’en donner et l’amitié a grandi entre nous deux.